Le foot rend-il con ?Par Brice TOLLEMER, de Football.fr
le 26/02/2006
Une aire d'autoroute a été ravagée samedi soir par des supporters parisiens. Ce week-end aura encore été l'illustration de la bêtise universelle du football. En Espagne, lors de la rencontre Real Saragosse-FC Barcelone, des cris de singe ont été proférés à l'encontre de Samuel Eto'o qui, exaspéré, a voulu quitter le terrain. A un autre niveau, en France, des supporters du PSG se sont battus entre eux sur un parking. Des actes imbéciles et dangereux qui sont pourtant monnaie courante dans le monde du ballon rond, et qui touchent tous les acteurs de ce sport (supporters, joueurs, dirigeants). Mais les sanctions restent très limitées...
Un fascisme rampantIl ne passe pas un week-end en Espagne, sans que les insultes racistes descendent des travées des différents stades de la Liga. Le plus souvent des cris de singe, et le plus souvent adressés à Samuel Eto'o. Le Camerounais cristallise toute la haine et la bêtise des "supporters" adverses. Le pire, c'est que cet état de fait n'est pas nouveau, et que ces actes honteux sont peu, ou pas, sanctionnés. Alors samedi soir, l'attaquant de Barcelone en a eu marre. A la 77e minute de jeu, il a voulu quitter le terrain et rejoindre les vestiaires. Ses coéquipiers et son entraîneur l'en ont dissuadé. Le club catalan a pu s'imposer 2-0, mais la fin du match a été marquée par de véritables attentats de la part des défenseurs de Saragosse sur les joueurs du Barça. Apparemment, ils ont été gagnés par la bêtise ambiante.
Ce genre de situation pose vraiment problème, et l'absence de réponses adaptées aussi. En tant que phénomène médiatique, le football révèle en pleine lumière les différents maux de la société. Racisme, violence ordinaire, sont autant de tares que connaît le monde contemporain. Mais leur surexposition récurrente dans ce sport est aussi le fait de l'incompétence viscérale des différentes fédérations nationales, de l'UEFA et de la FIFA, qui préfèrent s'occuper de problèmes secondaires plutôt que se pencher réellement sur ces graves exactions. Il est quand même hallucinant de constater que les stades de football sont le seul lieu public où il est possible d'afficher aussi ostensiblement des sentiments racistes et xénophobes, pratiquement en toute impunité.
Un neurone, une bièreEn France, certains groupes de supporters ne brillent pas, non plus, par leur quotient intellectuel. Sans tomber dans un Sarkozisme sécuritaire qui consisterait à fliquer tous les membres des groupes Ultras, il serait quand même bon d'en dissoudre certains d'entre eux. Samedi soir, des supporters parisiens se sont battus entre eux sur un parking, en revenant de Nantes. Rien de très nouveau, ce genre d'affrontements est assez fréquent au cours de la saison. Le mélange bière + testostérone + effet de groupe explique en grande partie cela, mais là encore, c'est de la responsabilité des clubs et des instances nationales de prendre des sanctions. Mais ces supporters sont aussi des consommateurs, et il faut dans le mesure du possible éviter de les contrarier, d'autant plus qu'ils constituent une caisse de résonance qui peut influencer sur le limogeage de tel ou tel entraîneur.
Une coupable absenceCependant, rares sont les acteurs qui osent s'oposer frontalement aux types de conportements décrits ci-dessus. Seul Nike, et encore par souci mercantile, avait orchestré une grande campagne de communication contre le racisme dans les stades. Pire, certains techniciens du ballon rond profitent de ce climat nauséabond pour balancer "réflexions" racistes et révisionnisme historique. On se souvient du sélectionneur espagnol, Luis Aragones, traitant Thierry Henry de "sale négro". Plus récemment, l'entraîneur de la Juventus de Turin, Fabio Capello, avait vanté l'héritage franquiste en Espagne. Javier Clemente avait lui conseillé à Eto'o de remonter dans son arbre.
Côté joueur, les saluts fascistes de Di Canio lui ont seulement coûté un match de suspension et dix mille euros d'amende, alors que ce genre de gestes devrait l'exclure du monde du football. A côté de cela, rares sont les joueurs qui laissent afficher une véritable opinion. Seul Lilian Thuram semble avoir une réelle conscience politique, lorsqu'il avait publiquement interpellé le ministre de l'Intérieur français en décembre dernier à propos de ses déclarations sur les banlieues. On a trouvé un cerveau, il faut faire attention de ne pas le perdre, c'est pratiquement le seul.
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