par don corleone Sam 30 Juin - 23:09
Le Point.fr - Publié le 30/06/2012 à 14:58
L'ex-champion du monde en 1998 ne se sent plus désiré à l'OM. Un désamour et un manque de reconnaissance qui ne sont pas nouveaux.
Didier Deschamps, le 2 mai 2012 à Marseille. © Boris Horvat / AFP
--------------------------------------------------------------------------------
Commentaires (9) À ne pas manquer
Les Gracques, poil à gratter de François Hollande
Par Sylvie Pierre-Brossolette
La vraie-fausse rigueur de gauche
Par Sylvie Pierre-Brossolette
Juppé à la rescousse d'une UMP déchirée ?
Par Pauline de Saint Remy
100 millions de dollars pour extrader le Premier ministre de Kadhafi
Par Sihem Souid
Islande : la démocratie réinventée
Par Louise Cuneo
Les Iraniens se noient dans l'alcool
Par Armin Arefi
Didier Deschamps souhaite quitter l'Olympique de Marseille après trois années de bons et loyaux services. L'ex-capitaine des Bleus a déclaré qu'il ne pouvait plus travailler dans ces conditions, c'est-à-dire au côté d'un supérieur hiérarchique, José Anigo, avec lequel il ne s'entend pas. Si son départ se confirme dans les prochaines semaines, voire dans quelques jours, ce sera peut-être la fin d'une ère prolifique en titres pour le club phocéen, malgré la mauvaise série de résultats qui a plombé la fin de saison. En dépit de six trophées rapportés sur la Canebière, des supporteurs marseillais influents réclament sa tête, et la direction de l'OM le laisserait volontiers partir pour détendre l'atmosphère dans les coulisses et se débarrasser d'un salaire encombrant.
Un manque de reconnaissance flagrant que Didier Deschamps a du mal accepter. L'ancien milieu de devoir a toujours fondé la réussite de sa carrière de joueur, comme d'entraîneur, sur des éléments objectifs comme le palmarès. Son envie de voir ailleurs n'a donc rien d'étonnant, d'autant plus qu'il ne risque pas de disposer d'un effectif à la hauteur de ses ambitions pour la reprise de la Ligue 1. Et le natif de Bayonne n'en est pas à son coup d'essai en matière de départ conflictuel. Lorsqu'il quitte Monaco en septembre 2005, les supporteurs sont ravis qu'il s'en aille après les déclarations du champion du monde 1998 considérant, quelques jours avant, l'équipe de la Principauté comme "un bon club du championnat de France mais pas un grand club". Pourtant, il avait amené avec panache une incroyable équipe de Monaco en finale de coupe d'Europe en 2004. Là encore, Didier Deschamps s'en va en estimant qu'il mérite mieux au regard de ses compétences. Et il n'a, peut-être, pas tout à fait tort...
Le Forrest Gump de l'âge d'or du football français
Il est le seul capitaine à avoir brandi la Ligue des champions sous les couleurs d'un club français, l'OM, en 1993. Il est encore ce même capitaine de notre sélection nationale vainqueur de la Coupe du monde 1998 et de l'Euro 2000. Il est le dernier entraîneur français à avoir amené une équipe de Ligue 1 en finale de cette même Ligue des champions régulièrement confisquée par des clubs au rayonnement planétaire. Et il est ce coach à avoir mis fin à dix-sept années sans trophée pour Marseille avec ce titre de champion de France 2010 accompagné de cinq autres coupes.
Depuis les débuts de sa carrière de joueur à la fin des années 1980 jusqu'à maintenant, Didier Deschamps s'est ainsi trouvé mêlé à toutes les grandes épopées du football français de ces deux dernières décennies. Tel Tom Hanks dans Forrest Gump, qui assiste de ses yeux aux grands événements de l'Amérique du XXe siècle. Mais avec ce rôle discret symbolisé par son ancien poste ingrat de milieu récupérateur sur le terrain. L'homme de l'ombre s'est donc effacé derrière les buteurs malgré son statut de capitaine. Basile Boli est l'homme de Munich en 1993. Zinedine Zidane est le héros de 1998 et 2000. Et sa fonction d'entraîneur l'a poussé naturellement à se mettre au second plan au profit des héros monégasques Giuly, Rothen ou Morientes en 2004.
Pourtant, sa présence dans ces grands moments ne doit rien au hasard, et il a participé activement, mais discrètement, à ces réussites. Son amour de la compétition et sa soif de victoires se sont éveillés en côtoyant Bernard Tapie à l'OM, qui partageait la même ambition. Mais il a surtout fini son apprentissage de gagneur en Italie, une nation de football connue pour se conditionner de manière optimale afin de finir première partout. Il rapporte donc de là-bas les ingrédients indispensables pour se maintenir au haut niveau, à savoir la rigueur, le mental et la culture du résultat. Des notions qui font la différence quand il s'agit de disputer une finale. Et pour cela, il faut être tranchant dans le choix des hommes et la discipline, et être lucide sur les capacités d'une équipe.
Deschamps antithèse de Blanc ?
C'est là que ça coince en France, où beaucoup de footballeurs et de supporteurs de Ligue 1 ont du mal à accepter que Deschamps applique ses principes à la lettre. Honte à lui d'avoir dit que Monaco n'était pas un grand club, ont estimé les fans du Rocher. Inadmissible qu'il ait pensé que Marseille ne se donnait pas les moyens de ses ambitions. Et surtout beaucoup de footballeurs de l'Hexagone, sans cesse gratifiés par les médias pour avoir fait trois bons matches dans la saison, ont du mal à accepter sa gestion humaine objective mais parfois sans pitié, avec ce souci permanent d'accorder la seule priorité au collectif. Et pourtant, une telle méthode ne serait-elle pas salutaire pour relancer un football français en pleine dérive morale ?
La piste Deschamps pour le poste de sélectionneur des Bleus si Laurent Blanc décide de partir mérite que l'on s'y attarde. On connaît le - futur ex ? - entraîneur de l'OM pour avoir été intransigeant avec des joueurs comme Gignac ou Ben Arfa, qui ne respectaient pas ses directives. On l'a vu se montrer sévère mais juste avec un Mathieu Valbuena, qui s'est finalement relancé grâce à sa persévérance, jusqu'à figurer parmi les 23 Bleus pour l'Euro 2012. Le Basque accepte les joueurs talentueux mais seulement si ces derniers se mettent au service du collectif et considère que la cohésion du vestiaire est quelque chose d'indispensable pour être compétitif.
Alors que l'équipe de France est encore une fois en quête de rédemption après le comportement inadéquat de certains joueurs, l'intronisation d'un Père Fouettard comme Deschamps, aux états d'âme moins pesants, serait peut-être une chose positive pour les Bleus. Et Laurent Blanc, qui a privilégié le talent et la réputation plutôt que l'état d'esprit, a échoué jusqu'à présent...
Par Alexandre Borde Réduire le texteGrossir le texte